Portrait de Marie Massé des Longeais, de Nicolas de Largillierre










































XVIII ème siècle
Ce portrait à l’huile sur toile, de Nicolas de Largillierre, représente vraisemblablement Marie Massé des Longeais (vers 1702-1781), une figure de la noblesse française du XVIIIe siècle.
Cette femme assise de trois quart, typique des portraits de l’époque, porte une robe noire avec une garniture de dentelle blanche délicatement réalisée et des ornements raffinés.
Une étoffe dorée au décor floral de rouge et de blanc, dont une perle en goutte y est précautionneusement attachée, vient gracieusement habillée son épaule gauche. Une ornementation de perles dorées et roses vient contraster la couleur sombre de la robe. A son bout, une majestueuse et éclatante fleur rouge avec ses feuilles est positionnée au niveau du corsage.
Largillierre joue régulièrement avec les effets de matières, ici la dentelles légère et délicate s’oppose au tissu de la robe plus dense, les perles presque transparentes s’harmonisent avec le ruban presque imperceptible et translucide noué sur son bras droit, la fleur, mouvementé et de sa couleur chatoyante, peaufine cette harmonie et rappelle l’ornementation rouge liant une perle nacrée dans sa chevelure. Enfin, ses cheveux gris-blancs sont coiffés avec un style élaboré typique des tableaux de Largilliere, orné d’un ruban doré qui semble être de même nature que l’étoffe.
En arrière plan, comme pour souligner la beauté de cette femme, Largillierre a subtilement déterminé un intérieur aux traits caractéristiques grandioses. La vision d’une imposante colonne de style antique et le subtile jeu de nuances afin de marquer la profondeur de la pièce, nous donne à penser que cette dame de qualité est assise dans un château.
Ce type de portrait est typique des représentations de la noblesse ou de la haute société européenne.
Largillierre, maître du portrait baroque français, est reconnu pour son talent à capturer l’élégance et la distinction de ses modèles. Ce portrait, caractérisé par la douceur du visage, le rendu délicat des textures et les détails d’ornementation raffinés, reflète la maîtrise technique et le goût sophistiqué de l’époque. La palette chaude et les contrastes subtils mettent en valeur la carnation lumineuse du sujet, soulignant l’habileté du peintre à marier richesse décorative et sensibilité humaine.
Ce tableau témoigne du prestige des commandes aristocratiques au XVIIIe siècle et illustre le rôle essentiel du portrait dans la représentation sociale et culturelle de la haute société.
On peut retrouver ici toute la beauté d’un Largillierre, de part sa qualité et sa composition qui n’est pas sans rappeler plusieurs autres portraits vendus ces dernières années.
Ainsi dans les œuvres de Largillierre, le rouge, souvent employé avec finesse et éclat, joue un rôle symbolique et stylistique essentiel.
On retrouve ce jeu dans le tableau Portrait d’une femme, à mi-corps vendu 529 200 euros chez Christie’s en 2024, avec cette belle étoffe rouge et les fleurs des cheveux
La fleur rouge, fréquemment épinglée sur le corsage ou tenue par le modèle, est un motif récurrent qui enrichit la composition par son intensité chromatique et sa signification. On peut la retrouver dans nombre de ses compositions, comme Portrait présumé de la Comtesse Elisabeth de Saint-Périer(1701-1777) vendu en 2021 par Sotheby’s à Paris
pour 50 400 euros.
Également dans le Portrait of the Comtesse de Montchal (1715-1793), vendu par Sotheby’s de New-York en 2007 pour 138 420 euros
Ou encore dans Portrait d’une dame de qualité à la draperie bleue, vendu par Piasa en 2002, à Paris, pour 55 000 euros.
Et plus anciennement, le portrait de Brigitte Ansart wearing a blue dress, vendu en paire avec Joachim Delelée in a brown coat pour environ 77 000 euros en 1992 par Christie’s de Londres.
On y retrouve le jeu de ce rouge profond qui contraste avec les teintes plus douces et subtiles des carnations et parfois des étoffes, créant un point focal qui attire l’oeil du spectateur et une symbolique de la fleur comme ornement évocateur de richesse et de raffinement.
Elle est régulièrement associée à des bijoux de coiffe et un arrière plan à l’architecture antique, comme son Portrait d’une dame (1713)
vendu 58 750 euros en 2004 à Paris par Christie’s.
ou encore son Portrait de femme en robe dorée près d’une colonne, estimée 30 000 euros
en 2023 par Collin du bocage à Paris
dont on retrouve la perle nacrée suivi d’un bijou rouge dans sa coiffe.
Ces ornementations dans les cheveux, autre élément signature des portraits de Largillierre, reflète la mode somptueuse et complexe de l’époque. Les coiffures élaborées, souvent agrémentées de rubans, de perles ou de bijoux, témoignent du statut social et du goût distinguées du modèle. La sophistication de ces détails capillaires souligne la virtuosité du peintre dans la représentation des matières précieuses et des effets de lumière.
Cette particularité est partagée dans d’autres portrait à la composition identique, tout comme
Le Portrait d’une femme en Uranie, de trois-quarts, près d’un globe céleste, estimée 60 000- 100 000 euros en 2024 par Christie’s à Paris
Egalement dans le Portrait de femme à mi-corps, dit ‘portrait de la comtesse de Courcelles’
vendu pour 88 200 euros en 2022 par Christie’s à Paris
et sa Madame Houzé de la Boullaye, née Marguerite Elizabeth de Largilliere (1714) vendue pour 87 200 euros en 2001, à Paris.
Dont l’arrière plan semblable par la colonne et le bijou en goutte d’eau nacré et relié à une pierre rouge, est représenté au centre de son corsage, avec le rappel d’une goutte d’eau nacrée dans les cheveux et la fleur sur la poitrine.
En combinant rouge éclatant et riches ornements capillaires, Largillierre parvient à équilibrer majesté et délicatesse, tout en insufflant une dimension symbolique et narrative à ses portraits. Ces détails, loin d’être purement ornementaux, participent pleinement à l’expression du caractère et de la prestance de ses sujets, tout comme le fait l’arrière plan.
Enfin, il n’est pas rare de trouver chez Largillierre, des portraits ovales,
Comme son Portrait of Angélique d’Hautefort, half-length, in a red & gold Bodice (1969)
vendu 75 670 euros en 2007 par Christie’s de Londres
Et bien d’autres nombreux portraits d’hommes et de femmes de la haute société :
Portrait présumé de Madeleine Charlotte Le Tellier (1704) vendu en 2000 pour 79 200 euros à Nice,
La Lady possibly Marie-Adélaïde de Savoie(1685-1712) Duchess de Bourgogne (1705), vendue 55 240 euros par Christie’s de New-York en 2000
Le Portrait d’homme en habit rouge vendu 121 220 euros en 2019 à Paris
Ou le Portrait of François-Emmanuel Pommyer (1703-1779) vendu 50 890 euros en 2011 à New York,
Et le Portrait of a Gentleman vendu 50 500 euros en 2005 à N.Y
Et beaucoup d’autres.
Notre portrait, initialement de forme ovale, fut adaptée à un format rectangulaire lors d’un rentoilage postérieur.
Ce tableau est présenté dans un cadre en bois sculpté et doré, orné d’un cartel en pied, témoignant du raffinement des encadrements d’art au XVIIIe siècle.
Le cartouche porte l’annotation « Countess of Longeais », tandis que le revers de la toile révèle plusieurs étiquettes anciennes, dont certaines datent probablement du XIXe siècle.
Celles-ci mentionnent des références telles que « 2354 / Largillière » et « 3304 / Largillière / Ctesse Longeais ».
Ces étiquettes constituent des indices précieux sur la circulation du tableau au XIXe siècle. Ces deux dernières mentions notamment, vraisemblablement liées aux catalogues d’expositions ou aux inventaires de collections, indiquent que le portrait a été soumis à l’appréciation du public ou aux cercles artistiques à plusieurs reprises, renfonçant l’idée de l’importance et de la reconnaissance de cette œuvre et de son artiste à cette époque.
Une étiquette imprimée au début du XXe siècle porte le numéro « 20554 », probablement une exposition muséale ou en vue de vente. Ces informations témoignent d’une riche histoire d’expositions et enrichissent notre compréhension de la côte de ce très grand artiste.
Ce tableau fut, par ailleurs, largement mentionné dans des publications et exposé au cours du siècle passé. En cela, il est la constatation d’un travail d’exception et se définit comme une illustre pièce de Largillierre.
Provenances :
Ce portrait possède une provenance prestigieuse, ayant appartenu à plusieurs marchands d’art et collectionneurs influents :
Charles Sedelmeyer (1837-1925), éminent marchand d’art parisien,
Puis son gendre, Eugène Fischhof (1853-1926), marchand d’art opérant à Paris et New York.
Theron J. Blackeslee (1853-1914), marchand d’art basé à New York et Boston.
Et Maurice Segoura (1930-2013), célèbre antiquaire parisien.
Il fut également vendu lors de la vente Fischhof aux Fifth Avenue Art Galleries de New York, les 22-23 février 1907 (lot n° 103, illustré) et lors d’une vente à l’Hôtel Drouot de Paris, le 16 juin 1987 (lot n° 48, illustré).
L’œuvre est mentionnée dans plusieurs publications, notamment :
J.E. Whitby, « Brussels Exhibition of French Art of the Eighteenth Century », dans The Connoisseur, vol. 9, mai-juin 1904, p. 101,
ainsi que dans le catalogue de l’exposition « L’Art français au XVIIIe siècle », Bruxelles, Société française de bienfaisance, Jean Malvaux et Charles Bulens, 1904.
Il fut également exposé à Bruxelles de janvier à mars 1904 lors de l’exposition « L’Art français au XVIIIe siècle », sous le numéro 40.
Largillierre étant un très grand maitre de cette époque, il est souvent représenté dans les musées et certains de ses tableaux peuvent atteindre des sommets, comme le tableau de La belle Strasbourgeoise
vendu par Christie’s en 2020 pour 1 570 000 euros à Paris.
Dimensions : H : 78,5 cm x L 63 cm
Dimensions avec cadre : H : 111 cm x L 93 cm